Pourquoi les pays les plus touchés par le Covid-19 n’ont-ils pas verrouillés leurs frontières?

Le Covid-19 a d’ores et déjà touchés plus de 187 pays et territoires faisant près de 298.000 victimes à ce jour. Les 200 pays de la planète se calfeutrent, ferment leurs frontières pour tenter de maîtriser la propagation du virus.

Sur les 2 cartes ci-dessous, nous voyons que les pays les plus touchés par le Covid-19 (Etats Unis et Europe principalement) n’ont pas fermés leurs frontières aux étrangers de manière stricte.

Rouge : Frontières fermées aux étrangers, exception faite du transport de marchandise.
Orange : Restrictions aux frontières. Seules certaines catégories de voyageurs sont acceptées, comme les travailleurs transfrontaliers, par exemple. Certaines nationalités pourront également se voir refuser l’entrée sur le territoire.
Jaune : Les conditions d’entrée sont quasi-normales. Valable uniquement pour les Européens dans l’espace Schengen.
Gris : absence de données.
Cas de Covid-19 dans le monde au 17 mai 2020

Le virus ne connaît pas les frontières

Depuis les premiers cas de Covid-19 à Wuhan en 2019, la propagation du virus s’est faite principalement par les flux de populations à travers le monde. Après deux mois d’une crise sanitaire mondiale sans précédent, les « dé-confinements » pays par pays s’opèrent peu à peu et la question de la réouverture des frontières reste en suspens.

Sur la carte, ce dégradé de rouge au jaune indique qu’en matière de frontières, « la loi du tout ou rien » ne s’applique pas. Pourquoi ne pas profiter de cette période pour se demander à quoi servent réellement les frontières?

Depuis le 17 mars, les frontières de Schengen sont fermées pour les Etats-Unis ou la Chine et chaque grande puissance a fermé ses frontières comme si les voyageurs avaient la peste. Ces mêmes voyageurs, guéris aujourd’hui espérons-le, assurent les voyages d’affaires réguliers ou le tourisme de masse et seront nécessaires à la relance économique mondiale de demain. Il faudra les scanner sous toutes les coutures dans les aéroports avant qu’ils ne soient autorisés à dépenser leurs devises.

La frontière est en effet une ligne imaginaire, mais on se rend compte du côté égoïste de celle-ci: on souhaite protéger du virus sa famille, sa ville, puis son département, puis sa région, puis son pays et enfin son continent. Pourquoi n’y a t’il pas une politique mondiale face à cette pandémie? Quelle différence y a t-il à entre avoir été contaminé à Briançon et à Bardonecchia (petite ville italienne)? Pour le virus, aucune différence, mais pour l’étude des cas contacts, ce sera bien plus aisé dans un pays où les interlocuteurs parlent tout simplement la même langue et où le process est harmonisé, espérons-le. Et à l’heure où en France, certains décrets préfectoraux se substituent à des règles nationales, on se doute qu’un message européen clair et respecté de tous ne soit peut-être pas pour demain.

Interrogé le 7 mai, Christophe Castaner, le Ministre de l’Intérieur qui a du mal avec les gestes barrières, affirme que l’on sait à peu près ce qu’il va se passer pour l’Europe, pour le reste, ça semble être l’inconnu :

La fermeture des frontières en Europe reste toutefois « la règle », (…) les restrictions aux frontières avec les pays de l’espace européen (Union européenne, Schengen, Royaume-Uni) seront « prolongées jusqu’au 15 juin au moins » et les frontières avec les pays non européens « resteront fermées jusqu’à nouvel ordre » (Christophe Castaner)


La frontière, c’est une barrière sanitaire supplémentaire

Face au virus, chaque continent, chaque pays a réagi différemment sur la notion de la fermeture des frontières. L’Europe a été quelque peu plus laxiste que l’Asie ou l’Afrique. Mais sans parler de frontières qui délimitent un pays, la France est coupée en deux avec une frontière artificielle selon que vous soyez une région rouge ou une région verte (cette couleur étant définie selon la circulation du virus et le taux de remplissage des services de réanimation de ladite région).

A l’international, le spécialiste des migrations et des relations transatlantiques au cercle de réflexion Centre for European Reform, Luigi Scazzieri, explique à l’AFP :

« Il est très probable que les frontières internationales resteront partiellement fermées au moins jusqu’à ce que la pandémie soit sous contrôle à la fois en Europe et aux Etats-Unis, ce qui n’arrivera pas au même moment » (…) « Mais même après la levée des restrictions, il ne faut pas s’attendre à un retour à la normale: de possibles mesures de quarantaine, mais aussi la peur, risquent de continuer à affecter le tourisme et, dans une moindre mesure, les voyages d’affaires » (Luigi Scazzieri)

Le monde entier s’observe, scrute les effets de telle ou telle décision au niveau local ou international pour ensuite adapter la meilleure stratégie au fil de l’eau. Les prochaines semaines vont être capitales. Si le virus disparait, comme l’indique le Professeur Raoult, le tourisme, les hotels, la restauration vont être reboostés naturellement, par contre, si, comme l’indique le directeur régional de l’OMS pour l’Europe :

« Le coronavirus reviendra cet hiver. Une seconde vague qui pourrait être plus terrible encore que la première car elle sera associée à d’autres épidémies saisonnières comme celle de la grippe » (Euronews, 16 mai 2020)

Si cette hypothèse est vérifiée, il faudra réellement repenser à notre façon de travailler, de voyager et de vivre sur la durée avec ce Covid-19. Les français se moquaient des chinois quand ils venaient en France avec des masques, mais aujourd’hui, le monde entier se met à la sauce chinoise.

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