La Tour Triangle et sa faveur de 263 millions d’euros d’argent public

On attend toujours, comme Rachida Dati (voir ci-dessous) que l’Institution judiciaire ouvre une enquête sur une des trois affaires qui ont été relevés par la Chambre régionale des comptes fin juillet 2020 lors du premier Conseil de Paris de la nouvelle mandature.

Si Anne Hidalgo s’est défendue sur les affaires des salaires exorbitants à la Tour Eiffel ou ses modes de recrutement dans les arrondissements, en revanche celle du Parc des expositions met en jeu plus que sa propre gestion, mais aussi l’époque où elle n’était que première adjointe.


Une affaire sous le tapis depuis 5 ans

En effet, l’affaire du contrat du Parc des expositions de la Porte de Versailles est particulièrement édifiante. Et son histoire avait déjà été racontée en partie dans le Canard Enchaîné le 15/7/2015. A croire que les magistrats du Parquet National financier ne lisent pas ce journal…

Le feuilleton de la Tour Triangle, censée voir poser sa première pierre en 2013, est à la fois politique et financier, et a déjà été repoussé au Conseil de Paris lorsqu’Anne Hidalgo devenait maire.

En 2008, le maire de Paris est alors le socialiste Bertrand Delanoë. Le promoteur Unibail-Rodamco devenu Unibail-Rodamco-Westfield, qui détient le site du Parc des expositions via la SEPE (Société d’exploitation du parc des expositions), projette de construire sur ce site du XVème arrondissement la Tour Triangle, la deuxième construction la plus haute dans Paris intra muros. Le projet, de 100.000 m2, se monte à 550 millions d’euros.


Un promoteur en position de force

A l’époque la concession de ce terrain acquise à Viparis, filiale d’Unibail court jusqu’en 2026. Or, pour dégager une rentabilité à cette nouvelle concession, il faut qu’elle dure au moins 50 ans. Yves Contassot, élu écologiste au Conseil de Paris et adjoint à l’environnement de Delanoë, l’affirme :

« Unibail a exigé que sa concession soit dénoncée et remplacée par une nouvelle jusqu’en 2065 ». (Le Canard Enchaîné, 29/07/2020)

Qu’a cela ne tienne, l’exécutif parisien acceptent le marchandage. La Ville de Paris a versée 263 millions d’euros à la SEPE, pour pallier un soi-disant « manque à gagner ». Mais, comme le révèle le Canard Enchainé du 5 août 2020, les services de delanoë ont tenté d’infléchir cette décision:

« Ce type de résiliation peut donner lieu à une indemnisation versée au promoteur (…), qui peut s’estimer « évincé » du terrain qu’il exploite. Les services de la mairie, eux, recommandaient à la place un simple avenant, ce qui évitait d’avoir à dédommager Unibail. Mais Bertrand Delanoë n’a pas tenu compte de l’alerte. » (Valeurs Actuelles, 04/08/2020)


Un « cadeau » de 263 millions d’euros?

Pire que cette soi-disante « surdité », le maire de l’époque a mis comme condition pour les candidats au rachat de cette parcelle de la Porte de Versailles un ticket d’entrée de… 263 millions d’euros. Le seul autre candidat, GL events, se retire vite de la course.

La mairie signe alors un « bail emphytéotique administratif » (BEA) avec Viparis. Il s’agit bien d’un marché privé, comme la Justice le confirmera ultérieurement.
Alors que, et c’est ce qui interpelle, Unibail continue toujours de toucher de toucher des revenus sur ce site, l’un des plus rentables de France. Et plus fort encore, après la signature, le promoteur cherche à étendre ses activités au-delà des termes du BEA en construisant un second immeuble de bureaux de 13.000 m2.

Pour Philippe Goujon, maire LR du XVème arrondissement, dans ce dossier « On nous a menti à tous les niveaux » (Challenges, 05/08/2020)

Les faits, s’ils sont constitués, relève du délit de favoritisme et de détournement de fonds publics.


Pour aller plus loin : le rapport de la cour régionale des comptes.

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