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Boualem Sansal: le séparatisme de Macron, c’est « du baratin »

L’écrivain Boualem Sansal, auteur de 2084: la fin du monde, a connu en Algérie terrorisé par le plusieurs groupes islamistes (GIA, AIS et GSPC) à coup de 50 attentats par jour. Pour enrayer le terrorisme islamique, l’Etat a utilisé « la torture, des arrestations de masse et les exécutions extrajudiciaires ». Impensable ici-bas, et heureusement.

L’analogie avec l’Algérie est éclairante dans une fable qu’il a publiée il y a deux ans chez Gallimard:

« Oui, l’Europe a peur de l’islamisme, elle est prête à tout lui céder. […] La réalité en boucle n’a pas d’effet sur les gens, en apparence du moins. On l’a vu en Algérie durant la décennie noire : les gens qui, au début, s’émouvaient pour une victime du terrorisme ont fini après quelques mois de carnage par ne ressentir d’émotion que lorsque le nombre des victimes par jour dépassait la centaine, et encore devaient-elles avoir été tuées d’une manière particulièrement horrible. Terrible résultat : plus les islamistes gagnaient de terrain et redoublaient de cruauté, moins les gens réagissaient. L’info tue l’info, l’habitude est un sédatif puissant et la terreur, un paralysant violent. »

Boualem Sansal, dans Le Train d’Erlingen ou La Métamorphose de Dieu chez Gallimard

Censuré dans son pays natal l’Algérie à partir de 2006, il a été fou de colère après la décapitation de l’enseignant Samuel Paty. Dans une interview à Courrier International, il revient sur l’aphasie de la société française face à l’islam politique. Il regrette que les suites de l’attentat ne soit qu’un « concours d’émotion » qui nous la laisse la « conscience tranquille ».


Les intérêts à l’étranger

Selon lui, les démocraties européennes sont pris en tenaille entre intérêts géopolitiques et tolérance à l’intolérance.

« Les pays occidentaux ne veulent pas se mettre à dos des pays puissants comme le Qatar et l’Arabie Saoudite. Mais aussi à cause du “politiquement correct”, les démocraties sont des sociétés policées. C’est une bonne chose, mais du coup, à table, on ne dit jamais “merde”.

Boualem Sansal, dans Courrier International, octobre 2020

En utilisant le terme de séparatisme, la faute d’Emmanuel Macron est de laisser à penser que les islamistes veulent se séparer de nous, car dans les faits leur projet explicite est de renverser notre civilisation et convertir tous les européens à l’Islam.


« Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde » (Albert Camus)

Pour lui, la différence entre Islam modéré et Islam radical est très mince, et a même tendance à disparaître. En niant la dimension politique et internationaliste de l’islamisme, on ne dessine pas complètement le visage de l’ennemi mortel, les salafistes et les frères musulmans, qui par écran interposé, profite de ce vide conceptuel. Il prône une réponse européenne au défi de l’islamisme:

« La France, seule, ne s’en sortira pas. Il faut penser la lutte contre l’islamisme au niveau transnational, c’est-à-dire européen. Il faudrait créer une structure composée de politologues, de philosophes, de sociologues, de savants, qui seraient chargés de répondre à cet islamisme. Et pour commencer, de le nommer clairement. Souvenez-vous, Camus disait que “mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde”.

Boualem Sansal, op cit.

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