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Covid: 24,6 millions d’€ pour les cabinets de conseil contre 20 millions d’€ pour trouver un vaccin

Matthieu Aron et Caroline Michel-Aguirre, grands-reporters à l’Obs et auteurs des « Infiltrés » sorti le jeudi 17 février 2022 (Allary Editions) ont mené l’enquête sur l’addiction de l’Etat aux consultants.

Une question ressort du livre: Combien ont touché exactement les cabinets de conseil privés pendant les 18 premiers mois de la crise du Covid19? Et pourquoi, au regard des nombreuses têtes pensantes que compte notre mille-feuille administratif, cette masse d’argent n’a-t-il pas été mis ailleurs, notamment dans la recherche de vaccin ou de traitement?


Des contrats mirobolants reconduits chaque semaine

Et ils ont découvert une facture globale de 24,6 millions d’euros, dont 10,7 millions d’euros rien que pour le cabinet McKinsey, dont Victor Fabius est directeur associé. Pas moins de 7 entreprises ont signé avec l’Etat 47 contrats à partir de mars 2020. Et sur cette même période, les efforts consentis par l’Etat pour développer un vaccin (auquel le Président ne croyait pas en octobre 2020 puis duquel le Président Macron disait qu’il « fallait rêver aux étoiles ») en France n’ont été que de 20 millions d’euros.


Les pompiers-pyromanes

Sur quoi ont-ils travaillés, dans la plus grande opacité? Sur l’évaluation des stocks de masques, la logistique, avec des contrats prolongés toutes les deux ou trois semaines. Ces cabinets ont également fourni des études sur le marché des tests, les réactifs, et la stratégie vaccinale (dont les contours de l’intervention restent encore flous au regard des auditions réalisées par la commission).

Et puis il y a des implications sur les lits d’hôpitaux. Les auteurs se plaisent à rappeler que le directeur des pôles Santé et Secteur public de McKinsey, Thomas London, considérait en 2018 qu’il y avait 20% et 25% de lits en trop (et donc de soignants) à l’hôpital. Et qu’à rebours, que les administratifs étaient très utiles à l’hôpital. Quand on sait que la crise s’est cristallisée sur le nombre de lits d’urgence, c’est moins paradoxal que prévu. En réalité, c’est la stratégie du « pompier-pyromane », qui déclenche des crises pour mieux se précipiter au secours de l’Etat.


L’Etat ne sait pas compter… et c’est très inquiétant

Il est compliqué de déterminer le coût annuel des cabinets de conseil à l’Etat. Ni le gouvernement, ni la commission d’enquête sur «l’influence des cabinets de conseil sur la conduite des politiques publiques» n’a pas de chiffre solide à disposition, et pour se le représenter, il faut s’imaginer une fourchette de 1,5 à 3 milliards d’euros, soit l’équivalent du budget de la Ministère de la Culture. Face à la polémique qui commence à enfler, la ministre Amélie de Montachalin, mise en difficulté en commission prévoit d’ores et déjà de réduire d’au moins 15 % le recours aux cabinets privés. Et du côté de Gabriel Attal, on parle maintenant de cabinet de conseil interne (voir ci-dessous).

Sort-on le parapluie en prévision du gros temps du solde de cette gestion de crise qui arriverez tôt au tard?


Le cas singulier des services informatiques

Moins de 1% des fonctionnaires sont informaticiens. Il est donc logique de retrouver la plus grande part de cette somme astronomique dans les « grands projets » des services informatiques, dont 90% à 95% échappe au directeur du numérique. Ce qui n’a pas empêché le ministère des finances de ne pas avoir recours à des cabinets de conseil pour la réforme du prélèvement à la source. Tout est question de volonté politique. Et aussi de lutter contre les conflits d’intérêts, le pantouflage (fait de passer du public au privé et vice-versa) et les emplois familiaux.

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