Nicolas Baverez, né le 8 mai 1961 à Lyon, est un essayiste français et avocat depuis 1998. Ancien élève de l’École normale supérieure. Il est docteur en histoire et diplômé en sciences sociales.
Oui, selon Nicolas Baverez, il est possible de relocaliser en France, dans une tribune au Figaro le 31 mai 2020. Après tout, l’Allemagne, la Corée du Sud ou Taïwan ont réussi à le faire. La tendance actuelle du bio, des produits sains et contrôlés et du circuit court sont des tendances de fond dans le monde occidental, qu’il ne faut pas négliger. La crise du coronavirus a mis en exergue notre dépendance vis-vis de la Chine sur toute une série de produits sanitaires de première nécessité, comme les masques. Mais la bataille du XXIème siècle, qui conditionne notre indépendance européenne et française, est celle des industries autant que celle des services.
Ce n’est un secret pour personne, l’industrie joue un rôle majeur dans l’emploi. Or, en France, le tissu industriel a fondu de 2 millions d’emplois en l’espace de vingt ans, n’émargent qu’à 10,2% du PIB contre 23% en Allemagne. L’automobile, hors sous-traitants, ne compte plus que 900.000 salariés, et l’aéronautique, 200.000 employés (L’Usine Nouvelle, chiffres de 2019).
D’ores et déjà les États-Unis et le Japon demandent à leurs grands groupes industriels de rapatrier les productions à haute valeur ajoutée et à diversifier leurs fournisseurs en Asie. A ce stade, il ne faut pas confondre délocalisation et fermeture des frontières.
La compétitivité est la mère de la souveraineté
Pour réussir la délocalisation, deux conditions doivent être remplies, selon Nicolas Baverez: premièrement, « éviter le piège du retour vers l’économie fermée et administrée » et deuxièmement, « s’inscrire dans une stratégie de longue haleine guidée par la compétitivité, l’investissement et l’innovation ». Autant dire que cela va de pair avec une certaine stabilité politique.
L’Etat doit bien sûr aider au redémarrage de l’activité, en complément d’une définition précise du prix du carbone et d’une taxe carbone aux frontières (le serpent de mer européen). « La relocalisation a un coût car elle implique une hausse des prix (NDLR: presque un gros mot), estimée à 3,5% au minimum pour les biens courants. Le grand marché européen (447 millions de consommateurs) constitue un atout majeur et un cadre idéal pour les stratégies de relocalisation ».
Au lieu de suivre les Américains sur le terrain du moins-disant écologique (qui restreignent les accords sur le climat avec la fracturation hydraulique) – l’Europe du Sud en général et la France en particulier – doivent mettre tout en œuvre pour améliorer « la qualification et la flexibilité du travail, l’investissement, les infrastructures et les compétences numériques ». Cela implique que les réformes spécifiques au monde de l’industrie soient entreprises sans délai, à savoir le démantèlement du carcan réglementaire et de la fiscalité sur la production.