Depuis le début du déconfinement, le nombre de clusters dans les abattoirs se multiplie. Et cela s’observe partout dans le monde, que ce soit en Allemagne, aux Etats-Unis, en Australie, en Irlande, au Canada… Les explications sont multifactorielles et le changement dans les conditions de travail reste complexe à mettre en oeuvre.
Le constat dans les abattoirs
Voici le nombre non exhaustif de salariés qui ont été contaminés par le Covid-19 dans les abattoirs français :
– 10 mai : 20 salariés sur 675 salariés sont testés positifs dans une société d’abattage de volaille dont la marque phare est Maître Coq, filiale du groupe sarthois LDC (Vendée)
– 19 mai : 109 salariés de l’abattoir de Kermené à Saint-Jacut-du-Mené (Côtes-d’Armor)
– 21 mai : 79 salariés de l’abattoir Tradival à Fleury-les-Aubrais (Loiret)
– 2 juillet : 28 salariés de l’abattoir Holvia Porc à Laval (Mayenne)
– Allemagne, 17 juin : 1 500 salariés contaminés sur les 7.000 à Gütersloh en Rhénanie du Nord-Westphalie dans le plus gros abattoir européen. L’usine de transformation de viande emploie de nombreux travailleurs étrangers auprès de qui les règles de distanciation sont expliquées par des traducteurs.
– Allemagne, 11 mai : 50 salariés sur les 260 employés dans l’abattoir de Vion située à Bad Bramsdet (Schleswig-Holstein)
– Aux Etats-Unis : Une usine Smithfield à Sioux Falls, dans le Dakota du Sud, : 890 salariés infectés, 20 morts et 5 000 hospitalisés avec symptômes. Selon le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), près de 4 % des salariés de cette industrie auraient été contaminés par le Covid-19 aux États-Unis depuis le début de l’épidémie.
On pourrait également parler des abattoirs en Australie, à Melbourne notamment, mais aussi au Canada ou encore en Irlande.
1 – Une contamination par les animaux?
Le patron de l’ARS Centre-Val de Loire, Laurent Habert, interrogé sur BFMTV, est formel :
“il n’y a pas de chaîne de contamination prouvée à partir de la viande ou de son ingestion, ce n’est pas le mode de transmission du virus”.
2 – La distanciation sociale?
Selon l’épidémiologiste Benjamin Cowie du Doherty Institute de Melbourne, cité par CNews :
« la distanciation sociale est très compliquée à mettre en place dans les abattoirs. De plus, aux Etats-Unis et en France, la plupart des abattoirs sont restés ouverts pendant le confinement pour permettre l’approvisionnement des grandes surfaces«
Un employé de Bretagne, lors d’une interview sur France 3 Bretagne évoque la distanciation sociale :
« Sur ma ligne, on est une douzaine à la découpe, parfois on se touche, au mieux on est à 50 centimètres les uns des autres »,
Il est vrai que ces cas de positivités apparaissent uniquement depuis le déconfinement alors que les abattoirs sont toujours restés ouverts. La différence, c’est que les masques et les tests sont depuis disponibles, et comme on trouve toujours que ce que l’on cherche, c’est probablement une des explications.
3 – L’exiguïté des lieux
Les employés sont nombreux, ils viennent des pays d’Europe de l’Est (c’est le cas pour l’Allemagne), ils sont souvent logés dans des logements précaires voire insalubres et au sein de leur usine, les vestiaires, lieux probables de contamination, sont là aussi exigus.
3 – Le froid et l’humidité : un cocktail propice au Covid-19
Dans les ateliers de découpe, la température doit être inférieure à 12 degrés et descend même à 4 degré dans les zones de pré congélation.
Autre élément en cause : la ventilation et la climatisation. « Les systèmes d’aération font du recyclage, en faisant tourner le même air sans apport d’air extérieur. À partir du moment où il n’y a pas de renouvellement d’air, c’est un facteur aggravant », explique à France 3 Yvon Le Flohic, médecin généraliste à Ploufragran dans les Côtes d’Armor.
4 – Les méthodes de travail incriminées
Les salles sont en permanence nettoyées au Kärcher, ce qui peut disséminer les particules infectées dans l’air. Or, le virus survit plus longtemps sur des surfaces humides et il apprécie les basses températures.
Le même docteur Yvon Le Flohic, le confirme : “L’utilisation de karcher et de scies provoquent des aérosols”. Ces flux d’air en milieu fermé pourraient être à l’origine de la propagation du virus.
On vient de le voir, les conditions de travail et le non-renouvellement de l’air spécifiques expliquent certainement la poussée du nombre cas de Covid19 dans les abattoirs à travers le monde.