Dans une longue tribune au Figaro Abonnés, Robert Redecker, fils d’ouvriers agricoles, professeur agrégé de philosophie et auteur de 24 ouvrages défend les propos chocs de Michel Houellebecq sur l’Islam au sein d’une interview pour le dernier hors-série de Front Populaire. Pour ses propos il est sous le feu croisé de la Grande Mosquée de Paris et de SOS Racisme, qui étudie à l’heure où j’écris ces lignes* la possibilité de l’attaquer.
Le philosophe Robert Redeker le fait au nom de cette liberté inaliénable qui est la « liberté de penser ». Lui-même a vécu quelques années sous protection policière pour avoir critiqué l’Islam qui a cédé à l’islamisme, analyse faite par de nombreux intellectuels de part le monde.
En reprenant les mots de l’écrivain français dans la revue de Michel Onfray et Stéphane Simon, Robert Redecker met en lumière deux constats saillants:
Pas d’appel à la violence
L’éternel candidat au Goncourt de littérature ne fait que développer des idées générales, des intuitions ou des prémonitions sur la situation séparatiste d’une partie des français vis-à-vis des autres (condensée dans la célèbre formule « demain, vivre face-à-face » de l’ex-ministre de l’Intérieur Gérald Collomb), et en aucune manière un quelconque appel à la violence.
Comme nous l’enseigne les Lumières, on a tout à fait le droit de critiquer une religion, et même d’estimer que telle ou telle est mauvaise pour l’avenir de la France. Quelle que soit son ancienneté sur le territoire.
Il faut lire les attaques de Friedrich Nietzsche sur le christianisme dans L’Antéchrist, Imprécation contre le christianisme (1896) comme «le chrétien n’est qu’un Juif de confession plus libérale» pour se rendre compte à quel point la pensée s’exprime « hors cadre » – pour être institutionnalisée, digérée un siècle plus tard. Dans la France contemporaine, on sourit en voyant rétrospectivement la dureté des attaques en 1857 contre Les Fleurs du Mal de Charles Baudelaire (censuré) ou Madame Bovary (pour lequel Gustave Flaubert comparait au tribunal) au nom de l’immoralité.
Nul ne peut pas se substituer aux conversations du peuple
Car en prenant la parole au nom de la « population française de souche », il ne commande pas, ni ne désire, l’appel à la violence ou à la discrimination. Houellebecq ne se fait que le ventriloque de son époque, il croque la société en observateur lointain (vivant la plupart de l’année en Irlande comme chacun sait).
Et sondage après sondage, l’inquiétude des français à propos des musulmans (L’an dernier, 83% des français estimaient que les étrangers devaient vivre à la française) ne fait que remplir la caisse d’écho que constitue tangiblement la littérature de Michel Houellebecq, le livre « Soumission » (janvier 2015) en tête.
La question inextricable de la généralisation
Et la généralisation est impardonnable pour les uns (dire « les » musulmans au lieu « des » musulmans), quand elle est la routine pour le camp du bien, c’est-à-dire celui de la gauche bien-pensante. Ainsi, il n’a pas fallu une heure après la fusillade raciste de la rue d’Enghien, pour les adversaires farouches de la critique de l’Islam ne relient l’acte d’un déséquilibré sans appartenance politique particulière à « l’extrême droite ».
En se plaçant sur le terrain judiciaire comme il l’avait envers Charlie Hebdo en 2006, Robert Redecker estime que la Grande Mosquée de Paris met une cible sur le dos de Michel Houellebecq, comme Samuel Paty ou Salman Rushdie avant lui. Et pire encore, ces actions judiciaires entretiennent l’auto-censure galopante dans le monde intellectuel au nom du sacro-saint « respect des différences ».
Un seul souhait, en conclusion de cette démonstration aussi forte que nécessaire : il faut défaire devant les tribunaux ceux qui veulent instaurer une police de la pensée en France. Et Michel Houellebecq a toutes les chances d'y parvenir. Souhaitons le.