Il suffit de réfléchir à ses conséquences pour mesurer à quel point c’est un sujet considérable. Car il concerne aussi bien la protection du territoire français contre le terrorisme, le trafic de drogue en France ou vers le reste de l’Europe, que le grand banditisme financier. Rien que ça.
Dès le 1er septembre 2023, sauf réécriture de la Loi, les douanes françaises seront juridiquement entravées de manière à peine croyable dans leurs différentes missions de fouilles de véhicules et d’individus, à l’exception seulement des ports, aéroports et des contrôles aux frontières. Au point de faire prédire à un syndicaliste des douaniers :
«La fin de la douane française, et l’autoroute pour les trafiquants ».
« Une décision qui ne rend service qu’aux truands »
Cette perspective est le fruit de la décision du Conseil constitutionnel du 13 septembre 2022 déclenchée par une Question prioritaire de Constitutionnalité (QPC) déposé par un avocat en juin dernier.
Cette QPC a été soulevée à la suite d’un « banal contrôle d’un véhicule ». Enfin banal… celui d’une personne transportant 47.000 euros en liquide dans des paquets thermosoudés, qu’il a fait passer pour des économies durement gagnées.
Déterminé à le faire innocenter, son avocat a pointé le procès-verbal des policiers et le flou de l’article 60 du code des douanes datant de 1948 pour traîner les douanes jusqu’en cassation, puis a pointé la QPC.
Les sages du Conseil constitutionnel ont considéré que l’article 60, en tant que tel, n’encadrait «pas suffisamment le cadre applicable à la conduite de ces opérations», et pour rentrer dans le détail, que:
«Les agents des douanes ne peuvent pas procéder à la visite d’un véhicule stationné sur la voie publique (…), ni procéder à une fouille à corps de la personne contrôlée. Ils ne peuvent maintenir à leur disposition l’intéressé que le temps strictement nécessaire à leur mission et ne sont autorisés à recueillir que les déclarations faites en vue de la reconnaissance des objets découverts»
Une syndicaliste anonyme au Figaro Abonnés, 02/02/2023
Résultat en pratique, aujourd’hui et demain
Dans plusieurs grosses affaires de drogue, les tribunaux, toujours ivres de remettre les délinquants en liberté ont remis en liberté des trafiquants, au nom de cette anticonstitutionnalité, avant même que cette décision ne soit définitive juridiquement. À chaque fois, l’administration a fait appel pour gagner le temps nécessaire à la réécriture de cet article du code des douanes.
Car pour le Gouvernement, qui est au courant depuis le début de l’année 2023, l’équation est simple: soit il réussit à réécrire en langue « constitutionnellement » propre les procédures de manière à être inattaquable, soit il abandonne, c’est-à-dire, tenez vous bien, mesdames, messieurs à « annihiler le droit » de fouiller les marchandises, moyens de transport et individus sur tout le territoire. De quoi laisser la police impuissante à contrôler tous les flux d’armes de guerre, d’argent sale et de paquets de drogues qui passent par nos routes.
Puisqu’on vous dit que les juges ont pris le pouvoir en France !