Éliane Houlette, 66 ans, ancien directrice du Parquet National Financier (PNF), a admis lors de son audition le 10 juin 2020 devant la commission d’enquête de l’Assemblée nationale consacrée aux «obstacles à l’indépendance du pouvoir judiciaire» qu’elle avait subi des « pressions » ainsi que des « demandes d’information constantes » du Parquet Général en février 2017 sur les enquêtes qui visaient le candidat à la présidentielle François Fillon.
« On ne peut que se poser des questions, c’est un contrôle très étroit et c’est une pression très lourde » (Eliane Houlette, 10/06/2020)
Un parquet aux couleurs du socialisme
D’après la magistrate, qui a quitté l’institution mi-2019, le Parquet Général aurait constamment demandé au PNF, dont il est l’organisme de tutelle, de confier l’enquête sur les époux Fillon à un juge d’instruction. Le parquet était alors dirigé par Catherine Champrenault, une proche de Ségolène Royal (conseillère à son cabinet en 1999 – Valeurs actuelles) dont la nomination fut pilotée personnellement par François Hollande (cité par le Figaro, 10/06/2020).
« Il y avait de «très, très nombreuses demandes» du parquet général qui s’ingérait «au quotidien dans l’action publique». Elles étaient «d’un degré de précision ahurissante« (…) «les actes de la veille», devait être synthétisée «avant 11 heures le lendemain» (NDLR: avant de tomber dans les mains de la Presse).(Eliane Houlette, 10/06/2020)
Les propos de la magistrate, libérée de la charge de sa mission, tient désormais le discours inverse de celui de l’époque de la Présidentielle, où les journalistes faisaient le pied de grue devant son bureau. En ce temps-là, elle affirmait ne recevoir « aucune pression« de qui que ce soit. Quoi qu’il en soit, pour une professionnelle du Droit, l’usage du mot « pressions » est tout sauf neutre.
Une enquête accélérée en un temps record
L’instruction préliminaire, au lieu de durer des mois, voire des années (comme le récente affaire des pierres bleues offert par Eiffage dans la terrasse de la maison du président de la MEL, Damien Castelain*), a été bouclée en quelques jours, une rapidité jamais vue dans l’histoire récente de la Justice.
Rappelons qu’au moment où l’affaire Fillon a été lancée par le Canard Enchaîné, que ce dernier était largement en tête des sondages pour le premier tour de la Présidentielle.
On se souvient que les journalistes du Monde Fabrice Lhomme et Gérard Davet racontait dans un livre en début d’année dans quelles circonstances la nomination du juge d’instruction le plus dur du Pôle financier, le Juge Serge Tournaire, qui avait déjà mis en examen Nicolas Sarkozy, à la place de Patricia Simon, qui était de permanence ce jour-là (RMC, 22/01/2020).
Plusieurs personnalités de droite, comme Eric Ciotti, ont réclamé de la part du Conseil Supérieur de la Magistrature et de la Ministre de la Justice, Nicole Belloubet, l’ouverture d’une information judiciaire pour forfaiture. En Droit, la forfaiture désigne une faute grave relative à l’autorité à laquelle un vassal ou un fonctionnaire doit allégeance.
Les partis de La France Insoumise et du Rassemblement National ont également dénoncé à travers cette sortie iconoclaste la preuve d’une instrumentalisation de la Justice, qu’ils étendant à leur propres problèmes judiciaires dans des affaires qui ont été ordonnés par les mêmes magistrats. (France Info, 18/06/2020)